La seule défense que les amis de Strauss-Kahn on trouvée pour le disculper des accusations portées contre lui, c’est de s’acharner contre sa victime sur des points qui n’ont rien à voir avec les faits reprochés à l’ex-directeur général du FMI.

La question n’est pas de savoir qui est ou qui n’est pas Nafissatou Diallo, encore moins qui sont ou ne sont pas ses proches, mais ce que l’ex-futur président de la République française lui a fait dans la suite du Sofitel.

Une chose est à peu près certaine, car parfaitement attestée par les éléments fournis par l’accusation. Personne ne le conteste : quelques dizaines de minutes avant d’aller déjeuner avec sa fille, Strauss-Kahn, qui aurait recouru dans la soirée précédant les faits aux services d’une call-girl, a eu un rapport sexuel avec une femme qui n’était pas sa femme légitime et qu’il n’avait jamais vue auparavant. Ce rapport sexuel a été accompagné de violences qui ont laissé des traces sur l’agresseur et la victime présumés.

Concernant la personnalité des parties, nous savons que Strauss-Kahn est un personnage ambitieux, arrogant, obsédé par le sexe et par l’argent, qu’il serait amateur d’échangisme, qu’il aurait recours aux prostituées, qu’une femme au moins (autre que Nafissatou Diallo) l’accuse de tentative de viol. Nous savons également que son épouse - présentée comme une sainte parce qu’elle est la petite fille d’un homme qui s’est enrichi en achetant bon marché des tableaux valant aujourd’hui des fortunes - tolère ce comportement et semble même en tirer quelque fierté.

On accuse la plaignante d’avoir menti. Est-ce la vérité lorsque les "communicants" de Strauss-Kahn le présentent aux Français comme un homme de gauche, exemplaire, antiraciste, uniquement préoccupé par les intérêts de son pays ?

On accuse la plaignante d’être proche - voire la conjointe - d’un trafiquant de cannabis. Treize millions de Français de 18 à 64 ans reconnaissent en avoir déjà fait usage au moins une fois dans leur vie. Plus d’un million de Français de la même tranche d’âge reconnaissent en avoir fait usage le mois dernier.

On accuse même la plaignante d’être une prostituée. Aucun sondage n’est disponible sur le nombre de Français mâles admettant avoir eu recours à une prostituée au moins une fois dans leur vie, et plus précisément au cours du mois dernier. Mais ce que l’on sait, c’est qu’il existe en France, sans parler de la prostitution étudiante, environ 30 000 prostituées professionnelles. Sur une moyenne vraisemblable de 2000 passes annuelles par prostituée on aboutirait au chiffre effarant de soixante millions de passes par an : l’équivalent de la population française !

On a, dans un premier temps, fait hypocritement passer Nafissatou Diallo pour une femme exemplaire (une femme « noire », pour être crue sur parole, devrait donc être forcément irréprochable) pour mieux la lyncher ensuite au motif qu’elle ne le serait pas.

De nombreux élus socialistes, renouant avec la tradition coloniale française, on pris d’emblée le parti du violeur présumé - le riche socialiste blanc, obsédé sexuel mais présenté comme un « séducteur » - contre une immigrée « noire » et pauvre - présentée comme une menteuse, une prostituée. Constamment, dans cette affaire, la victime a été bafouée. D’abord ignorée, puis lynchée par les médias. Cette attitude risque de laisser quelques traces.